« Copenhague, quand la géopolitique s’invite dans l’environnement : que peuvent attendre les gouvernements africains ? »
« Copenhague, quand la
géopolitique s’invite dans l’environnement : que peuvent attendre les
gouvernements africains ? ».
Copenhague ! La seule évocation récente de ce nom suscite des
réactions aussi controversées les unes que les autres. En effet, il se prépare
depuis quelques temps déjà un événement d’une importance capitale : le
sommet dit de Copenhague qui rassemblera des milliers de responsables du climat
du 7 au 18 décembre prochain. Intervenant après le protocole de Kyoto, il devra
permettre d’élaborer un accord global sur les émissions polluantes pour la
période post-2012. Aussi vise t-il à fixer les objectifs à atteindre à
l’horizon 2020 par les pays développés et à l’horizon 2050 par toute la
communauté internationale.
Confrontés à la menace climatique, les dirigeants du monde entier se rassemblent
autour d’un projet politique mondial fondé sur un constat scientifique objectif
et une lutte acharnée de la société civile internationale. Toutefois, les défis
sont légion et les enjeux très actuels.
Déjà, il se dessine le spectre d’une « realpolitik » de plus en plus
visible et d’une rivalité forte autour de ce sommet. Les puissances émergentes
comme la Chine, le Brésil et l’Inde menacent notamment de ne pas signer le
traité si les pays industrialisés ne suivent pas les recommandations du Giec
(Groupe Intergouvernemental d’Etude sur le Climat) en souscrivant à la
fourchette haute des réductions d’émissions c’est-à-dire moins quarante pour
cent (-40%) d’ici 2020. Mais l’élection de Barack Obama à la tête des Etats-Unis d’Amérique,
a amplifié les attentes de tous ceux qui souhaitent ardemment que la communauté
internationale s’engage à réduire les rejets de gaz qui contribuent au
réchauffement climatique. La position de l’union européenne en tant qu’espace
comprennent des Etats puissants et celle de ses différents Etats ne sera pas à
négliger. Encore moins celle des organisations non gouvernementales.
Dans un contexte de crise, l’un des principaux enjeux du sommet de
Copenhague est donc d’obtenir de chaque pays des engagements francs en signant
un accord par toutes les puissances mondiales. Ce sommet intervient à un moment
ou l’action « collective » internationale est aujourd’hui nécessaire pour
faire face au changement climatique.
Au delà de toutes ces considérations, que faut-il réellement attendre de
Copenhague pour le monde et pour l’Afrique en particulier ? On peut effectivement
s’attendre non pas à une intervention miraculaire ou divine mais tout au moins
à l’élaboration d’un scénario établissant le principe d’un objectif mondial de
réductions d’émissions auquel même les pays émergents seraient soumis. Le résultat
semble donc juste moins grand que tous les espoirs.
De plus, les conséquences que pourrait avoir une adhésion franche et massive de
l'Afrique à un tel processus ne sont pas négligeables. Cette adhésion pourrait avoir des
conséquences sur la dynamique de croissance économique de ce continent. Est-il
opportun de penser que les résolutions du sommet de Copenhague pénaliseront
encore plus durablement l'Afrique qui est un continent dont le
« développement » économique repose en grande partie sur
l'exploitation de ressources minières et/ou pétrolières ? L’avenir nous le
dira. Mais, il faut signaler, au demeurant, que si le climat et l’environnement
sont des biens communs et partant des biens collectifs pour l’humanité, le degré
de leurs dégradations par les sociétés n’est pas le même sur tous les continents.
Il ne fait l’ombre d’aucun doute, eu égard au niveau d’industrialisation à
l’échelle mondiale, que l’Afrique pollue moins que les autres parties du globe.
Cependant, les voix des Etats africains permettront de légitimer l’action des
organisations internationales dans leurs luttes contre la pollution tant il est
que ces Etats seront parmi les premiers à signer les résolutions qui pourront
éventuellement « sortir » de Copenhague. Les retombées pour
l’Afrique après une telle opération sont surtout le financement des programmes
qui pourraient être mis sur pied - tel a été le cas avec le sommet de Rio sur
l’environnement en 1992. Il permettra aussi aux gouvernements africains de
légitimer, auprès de la communauté internationale, l’image de leur action
publique en matière d’environnement d’abord ; mais aussi et surtout de
solder, comme il est de coutume, le passif de leurs pratiques politiques quotidiennes
teintées de réminiscences autoritaristes et de mœurs privatistes et
conservatrices du pouvoir. On comprend dès lors que les gouvernements africains
se mobilisent, tambour battant, pour Copenhague. Tels des acteurs dans un
espace de lutte où les rapports de force et de pouvoir entre grandes puissances
et moyennes puissances se dessinent et se dessineront même après Copenhague sur
les enjeux du climat, les Etats africains sont déjà persuadés qu’ils pourront
sortir de ces jeux de rivalités et de consensus, avec une part de satisfaction
politique, c'est-à-dire une satisfaction vis-à-vis de leur image et les
retombées sur en rapport avec leurs politiques publiques. N’oublions cependant
pas les conditionnalités qui pourront s’y dégager avec des conséquences non
escomptées sur l’Afrique.
Par Arlette JIOKENG et GEN-SERBE SINIKI, Master 2 Gouvernance et Politiques
publiques, UCAC.